Ouzon

Il suffit d’une vie pour céder.
Je le sais : mon âpre solitude
M’était une sinistre habitude.
J’avais déjà à toi renoncé.

Il suffit d’une année pour guérir.
Je le sais : je t’ai vue relevée
D’entre les presque-morts, sur tes pieds,
D’un blanc matin où j’ai cru au pire.

Il suffit d’une nuit pour aimer.
Je le sais : elle était ravissante
Cette demoiselle sautillante
Qui a pris ma taille pour danser.

Il suffit d’une heure pour haïr.
Je le sais : ma colère en lambeaux
Distingue pour moi le vrai du faux.
Y renoncer serait m’avilir.

Il suffit d’un instant pour mourir.
Je le sais : je n’ai pas oublié
Ta main juste au-dessus du muret
Que jamais je ne pourrai saisir.

Mais cinq années ne suffisent pas
Pour seulement me lasser de toi.


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